Cette année (2020) j’ai demandé aux étudiants de présenter le travail d’un·e artiste qui emploie la sérigraphie. Voici la présentation de l’atelier Bootlegz par Mattias Gatta.


Il y a une quinzaine d’années, Chakir et Michel, imprimaient leurs premiers T-shirt dans une cave. Aujourd’hui, ces deux anciens DJ et graffeur ont créé le Bootlegz Lab et sont établis dans la capitale comme une friterie à Grand’Place.

Très orientés vers la culture urbaine, ils travaillent avec de nombreux artistes issus de milieux différents : rap, breakdance, graffiti… Ils tirent principalement leurs inspirations de ces milieux-là mais également de la pop culture et du tissu urbain même de la capitale pour concocter les meilleurs prints dans leur labo.

C’est notamment par le détournement qu’ils font leur promo et bien qu’ils travaillent également avec des machines automatisées, leur éthique de travail se rapproche de celle de l’artisanat voire même du laboratoire expérimental.

POURQUOI BOOTLEGZ

« Le mot bootlegz vient du temps de la prohibition d’Al Capone en Amérique où l’alcool était interdit. Ils fabriquaient l’alcool dans les caves et le vendaient de manière illégale, sous le manteau. On a commencé plus ou moins de la même manière sauf qu’on est pas des gros truands d’Al Capone. Mais on a commencé dans notre cave à faire des t-shirts, les imprimer, les vendre de manière « non officielle » : sur événement, sur stand, de main à main, on faisait des dépôts en magasin… “

POURQUOI LA SERIGRAPHIE

Pour pouvoir mettre mes graff sur mes t-shirts.

PARCOURS

J’ai tout étudié sauf la sérigraphie. J’étais en Sciences-Math, après j’ai commencé pas une année d’archi, puis j’ai fais dessin industriel à l’ECAM. Là j’étais bien, j’aurais pu continuer en ingénierie industrielle mais je l’ai pas fait.

J’habitais en face d’une grande imprimerie textile. Tous les jours, je passais devant et je demandais s’ils engageaient. Un jour, le patron me dit : « Mais euh tu sais faire ? ». Moi : « Beh non ». Il me répond « Beh alors c’est mort ». Donc je lui ai répondu : « Ok beh, si jamais vous savez que je suis là ! », « Ouais ouais ». A la fin, tout le monde me connaissait dans l’atelier ; je venais tous les jours.

Et après 2-3 semaines, ils avaient une énorme commande de 15 000 pièces, je passe donc à l’atelier et ils me demandent si je suis chaud de les aider. Je dois rester devant le four et plier toutes les pièces qui arrivent… j’ai accepté direct.

Une semaine après, le patron vient chez moi et il me dit : « Ecoute, il y a une commande que personne veux faire parce que c’est chaud, c’est 800 vestes et c’est assez technique ». « D’office que je le fais », j’ai accepté direct! J’ai fini la commande plus tôt que prévu et j’ai été engagé.

Après 2 mois, je me suis inscrit à un concours européen d’impression textile de Fruit of the loom au nom de la société et j’ai gagné. Le prix c’était du matos et une mise en avant de la société dans les magazines, les salons, etc…

Du coup, je suis allé chez le boss et lui ai dit : « Ecoute, je t’ai fait gagner, y a moyen d’avoir une petite augmentation? », je ne perds pas le nord! Et il me répond : « Ecoute, t’es nouveau, tu ne peux pas gagner plus que les autres ».

« Ok, par contre de temps en temps, je veux pouvoir imprimer mes trucs perso ». Et il m’a dit : « Tiens la clé, l’atelier c’est à toi! ». A partir de là, j’ai imprimé des centaines et des centaines de trucs pour tout le monde, j’ai commencé Bootlegz comme ça. J’avais mon atelier dans ma cave mais je faisais mes cadre là-bas. L’atelier était pour moi, 1000 t-shirts, 1 pote ou 2 et jusqu’à 4h du matin j’y allais exagéré!

Après un an, je suis devenu chef d’atelier. Après 7 ans plus ou moins, mon entreprise a racheté une autre avec tout le personnel. Du coup, il y avait trop de monde à gérer et puis ce n’est pas ça que j’aimais faire. Je suis parti et on a lancé notre truc à fond avec mon pote.

Aujourd’hui c’est une petite entreprise de 3 personnes, 5-6 max et ont fait tout nous-mêmes : le contact client, le commercial, les devis, le graphisme pour tout ce qui est appliqué à la sérigraphie donc Illustrator et Photoshop pour les logos, les retouches, la séparation des couleurs, etc.